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Jean-François Bauvin : « Aujourd’hui, chacun est conscient de la nécessité de faire évoluer nos métiers »

 Photo JLPC

Comment s’organise l’archivage au sein d’une profession réglementée ? Quelles solutions peuvent-être mises en place dans ces métiers pour une digitalisation sereine ? Jean-François Bauvin, directeur général de l’Adec, éditeur de solutions logicielles et de services informatiques à destination du métier d’huissier de justice et membre de la FnTC, nous livre ses réponses. 

L’archivage électronique est-il très répandu chez les huissiers de justice ?

Nous sommes entrés dans la révolution numérique ; comme l’expliquait Patrick Sannino dès 2015 : « les huissiers de justice ont particulièrement fait la preuve de leur capacité d’innovation et de leur adaptation à la nouvelle ère digitale. La profession a pris conscience de la nécessité de “basculer” dans la dématérialisation, car le risque serait autrement de ne pas prendre ce virage et d’être marginalisés. Autour de nous, la révolution digitale est en marche, nous devons en faire partie ». Le ton impératif adopté n’est pas anodin ; il témoigne de la nécessité pour la profession de s’adapter à un bouleversement social de grande ampleur.

Dans cet esprit et pour résumer, il faut rappeler que les activités monopolistiques principales de l’huissier de justice sont au nombre de deux : la signification et l’exécution forcée. Par elles, l’huissier de justice participe au service public de la justice au même titre qu’un magistrat ou un greffier. Il ne peut donc pas prendre trop de liberté quant aux règles à suivre en la matière. La signification est un cas particulier de la notification, c’est-à-dire de la « formalité par laquelle on porte un acte à la connaissance d’une personne » Surtout, signifier n’implique pas seulement de remettre un écrit, comme le ferait un employé des services postaux, signifier c’est aussi transmettre le sens de cet écrit, s’assurer, autant que faire se peut, de sa bonne compréhension. L’évolution la plus notable, consacrée notamment par un décret du 15 mars 2012, se rapporte au procédé de signification lui-même.

 De quelle façon ? Une fois l’acte rédigé au format pdf, l’huissier de justice se connecte la plateforme consacrée Securact développée par L’ADEC, prestataire désigné par la Chambre Nationale, où l’acte est déposé dans un coffre-fort électronique après avoir été signé et scellé électroniquement.

 Le destinataire de l’acte est ensuite averti par courriel et texto qu’un acte est à sa disposition sur la plateforme en question. Il s’y connecte, récupère son acte, et un avis de réception, sur lequel figurent l’identifiant électronique du destinataire, la date et l’heure, est émis. L’huissier de justice n’a plus qu’à récupérer cet avis et à l’archiver. Pourtant, la signification électronique est très loin d’avoir été généralisée pour les particuliers. C’est que l’article 748-2 du Code de procédure civile exige que soit recueilli le consentement exprès à l’utilisation de la voie électronique pour chaque destinataire. Les justiciables ne sont pas tous égaux face à l’outil informatique, au niveau des connaissances pratiques ou de l’accès à internet, notamment.

 Pour l’heure, la signification électronique demeure essentiellement facultative. Notre système juridique ayant fait le choix d’une « démarche par équivalence », la référence de principe demeure la signification papier. Néanmoins une évolution importante est intervenue récemment ; en effet, depuis le 1er avril 2021, la saisie attribution et la saisie conservatoire de créances entre les mains des banques sont réalisées obligatoirement par voie électronique.

 La notion de « valeur probante » qui doit s’appliquer aux documents conservés pour les huissiers de justice, est-elle un frein pour l’archivage électronique ?

En aucune façon, puisque les critères d’archivage sont définis légalement et assurés par le partenaire de confiance de la Chambre Nationale, l’Adec, et ce à moindre coût pour l’ensemble de la communauté.

 Quelle est la plus-value de l’archivage électronique pour un huissier ?

Les besoins sont définis principalement au travers de nos obligations, que je vous ai décrites ; l’avantage essentiel pour le professionnel est l’absence de stockage physique (archive papier) et l’économie qui en découle. Il y a ainsi un transfert de cette charge vers le prestataire qui en assure la conservation (Adec) pendant 25 ans comme l’exige l’article R 212.5 du code du patrimoine.

Nous bénéficions donc d’une garantie de conservation dans le temps, grâce aux coffres-forts numériques. Accessoirement, la dématérialisation et l’archivage électronique assurent une transmission simplifiée des documents.

 La Chambre nationale des commissaires de justice et sa filiale ADEC ont mis en place la plate-forme Securact, quel est son objectif ?

SECURACT est une solution qui permet la signification des actes d’Huissier de Justice par voie dématérialisée. Ce service garantit la sécurité, la confidentialité et l’intégrité de la transmission de l’acte. Elle a été mise en place en 2012, époque à laquelle a été signifié le premier acte par voie électronique ; la généralisation du mécanisme a été décidée en 2020 et ouvert à toute personne physique ou morale ayant préalablement consenti ; le destinataire peut consulter et télécharger l’acte qui lui est adressé dans un environnement sécurisé et disponible 24h/24.

De plus, cette solution intègre l’archivage, à valeur probante, des actes dématérialisés dans un coffre-fort numérique, apportant les garanties d’intégrité, d’horodatage et de traçabilité.

 Pour l’archivage électronique, l’ADEC a mis en place le Minutier Central, en quoi consiste-t-il ?

Le Minutier Central consiste à transférer les minutes (originaux papier) convertis au format PDF vers les coffres forts mis à la disposition de chaque étude d’huissier de justice.  Chaque étude peut ainsi archiver toutes ses minutes, à des fins de conservation et de consultation. Toutes les minutes déposées sont préalablement signées électroniquement par les Huissiers de Justice qui disposent tous d’un certificat personnel de signature. Cela garantit l’authenticité du document déposé. Chaque étude d’Huissier de Justice possède ainsi son propre coffre-fort au sein de l’infrastructure de l’ADEC.

 Comment l’archivage électronique peut-il s’améliorer pour faciliter le quotidien des huissiers de justice ?

Par l’évolution des moyens technologiques de conservation et d’archivage, mais, de ce point de vue, cela n’est plus une question purement liée aux activités de l’huissier de justice mais de tout utilisateur d’outils numériques en constante évolution.

 Quels sont les principaux écueils à surmonter pour mettre en place l’archivage électronique ?

Les professions du droit et les huissiers de justice en particulier éprouvent certaines difficultés à remettre en cause des pratiques pluriséculaires qui ont fait leurs preuves et qui reposaient uniquement, jusqu’il y a encore peu, sur le papier ; aujourd’hui, chacun est conscient de la nécessité de faire évoluer nos métiers eu égard à cette révolution numérique qui s’empare de tous les secteurs d’activité ; les huissiers de justice accompagnent ce mouvement et se placent à l’avant-garde des innovations.